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TOMBÉ


Rennes, 14 août, quelques heures après
l’attentat dirigé contre Me Labori.

Je l’ai vu, étendu au travers de la route, la main gauche ensanglantée, fouillant sa noble poitrine, sa jeune femme, à genoux, soutenant sa belle tête de héros tombé. La mort qui semblait prochaine ce matin répandait déjà sa pâleur sur ces traits énergiques. À cette minute suprême, son calme regard rencontra le mien et, de mon poing porté à ma bouche, j’étouffai mes sanglots. Ô force, ô bravoure de l’âme devant la mort ! quelle est donc ta puissance dans le cœur de cet homme ? Ces prunelles que j’avais vues flamboyantes, chargées de menaces et d’éclairs, quand l’avocat de Zola, dans des audiences de tumulte, de haine et de mensonges, lançait l’anathème aux ennemis de la Vérité qui, tel un enfant en bas âge, qui trébuche, essayait alors ses premiers pas, ces prunelles sont maintenant sans colère et je lis en