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SUR MON CHEMIN

Nous continuâmes notre chemin. Je m’arrêtai devant la profession de foi de son concurrent. Avec un haussement des épaules :

— Il n’y a rien là dedans, me dit-il. Tiens, lis ça !

Et il me montrait sa proclamation.

S’il n’y avait rien dans celle de son adversaire, dans la sienne il y avait tout.

Tout ! Il promettait d’avoir une politique nettement républicaine, progressiste, radicale et… tolérante (lisez « opportuniste »). Il promettait le métropolitain, l’omnibus à deux sous, la suppression des octrois, la diminution des impôts ; il promettait de veiller à la sincérité et aux bonne mœurs financières, qui font la bonne santé politique des peuples ; il promettait de faire triompher les légitimes revendications des déshérités de la fortune ; il promettait la lumière aux aveugles et des jambes aux culs-de-jatte.

Là-dessus, on fit les visites à domicile. Alors, ce fut l’horrible, l’ignoble, ce fut la honte. Comment ces hommes dont nous verrons quelques-uns dans l’hémicycle, fiers et plastronnant, en des postures d’orgueil et le verbe arrogant, comment ces homme arrivent-ils à ce degré d’aplatissement et de servitude, d’hypocrisie et de mensonge, de vilenie et de bassesse ? Quelle force mystérieuse les courbe ainsi au pied de cette monstrueuse idole : le suffrage universel ? Quelle récompense attendent-ils donc ? Quelle joie se promettent-ils ? Quels triomphes, quelles