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POUR LES GRINCHUS

dimanche. Or, jugez de mon effroi : l’Exposition n’a pas été plutôt ouverte, que mon Duval ordinaire, où je procède depuis dix ans à ma quotidienne manducation, est devenu impraticable. L’idée qu’il va falloir le quitter m’est odieuse. Et cependant je devrai m’y résoudre, puisqu’à l’heure où j’arrive je n’y trouve plus ma place coutumière, ni d’autres. Quand je songe que, pendant six mois, je ne m’assiérai plus à cette table où Mathilde me servait avec tant de soin, de dévouement et d’attentions délicates, je n’ai plus d’appétit, Mathilde, messieurs, est une petite brunette accorte et malicieuse. Elle me permettait de lui dire d’aimables polissonneries au dessert, quand le coup de feu de midi était passé et que le « brochet » n’était pas là. Ainsi appelions-nous le gérant ; nous n’avons jamais su au juste pourquoi ; mais c’était délicieux. Que vais-je devenir ? Quant à elle, la pauvre, elle débitera du navarin à des provinciaux gloutons qui viennent à Paris pour voir l’Exposition ! Mon estomac la maudit, leur Exposition ! Que Dieu la damne ! Que le feu du ciel la dévore ou qu’un tremblement de terre l’engloutisse ! »

Ici l’artiste dramatique prit la parole :

— « — Monsieur le vieux Duvalier, dit-il, je crois qu’il n’est point besoin de tant de cataclysmes. Si le soleil qui s’est levé depuis trois jours à l’horizon de Paris ne se couche pas, avant quinze jours nous serons débarrassés de leur Exposition. Elle fondra ! »