Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/261

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ment de la sécurité des transactions l’augmentation incessante des capitaux par l’épargne enfin la moindre productivité des emplois pour les capitaux nouvellement formés dans les sociétés déjà vieilles. D’autre part, nous avons constaté que trois causes opposées tendent à faire hausser le taux de l’intérêt ce sont les grandes découvertes qui créent de nouveaux emplois particulièrement productifs c’est l’émigration des capitaux au dehors ; ce sont enfin les guerres et les grands emprunts publics, soit nationaux, soit départementaux, soit municipaux.

Il s’en faut, cependant, que ces deux séries de trois causes chacune se fassent équilibre et se neutralisent. Les trois causes qui déterminent la tendance à la baisse du taux de l’intérêt agissent presque avec continuité dans l’histoire les trois causes adverses ne sont pas permanentes, elles agissent parfois avec une grande violence, une souveraine énergie, mais toujours par soubresauts et à de longs intervalles. Ce sont comme des tremblements de terre qui disloquent les couches géologiques régulières.

En définitive, la tendance qui domine, celle qui peut être considérée comme une loi de la civilisation, c’est la tendance à la baisse du taux de l’intérêt ; et si on l’a trop oublié dans ces derniers temps, si le public a été surpris, depuis quelques années, de la soudaineté avec laquelle cette baisse est survenue, s’il refuse d’y voir un phénomène permanent, normal, c’est que nous sortons d’une période exceptionnelle dans l’histoire du monde, celle de 1845 à 1865, période où l’humanité a transformé tous ses moyens de production industrielle et de commerce, et où il s’est fait plus de changements dans les manufactures et dans les transports en vingt ans qu’auparavant en vingt siècles. Ce qui a retardé l’avènement de cette baisse du taux de l’intérêt, qui est un retour à l’état normal et à la tendance générale de la civilisation, c’est aussi l’effroyable consommation de capitaux faite par les guerres de 1860 à 1865 aux États-Unis, de 1866 en Allemagne et par la guerre de 1870-1871. La baisse du taux de l’intérêt qui se manifestait depuis 1866, qui avait été in-