Page:Leroyer de Chantepie - Chroniques et Légendes.djvu/61

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seul de votre voix, en endormant mes douleurs, me fit changer de résolution. Je retrouvai le désir de vivre, et je n’eus pas la force de fuir. L’amour que je croyais à jamais éteint, se ranima dans mon cœur, non avec cette violence que m’avait inspirée une jalousie insensée, mais avec la douceur insinuante d’un sentiment aussi profond que dévoué. Il me sembla que j’aimais pour la première fois, le passé s’effaça, et je retrouvai dans cet amour les joies primitives et pures de la jeunesse. Oui, ma chère Rose, c’est à vous à me condamner ou à m’absoudre ; déjà en faisant descendre l’amour dans mon cœur, je crois que Dieu m’a pardonné. Toutefois, ma chère Rose, je me demande si le sentiment que je vous inspirai ne sera pas détruit par l’aveu que je viens de faire. Jusqu’ici cette crainte m’a condamné au silence.

Ma famille est noble, et ma fortune considérable, mais que sont tous ces avantages à vos yeux ? Maintenant, mon sort est entre vos mains, et votre premier regard m’apprendra si vous voyez en moi un criminel ou un malheureux digne encore de votre amour.

Si mon espoir se réalise, nous ne nous séparerons plus, votre mère sera la mienne, et votre pays sera ma patrie. C’est en tremblant que j’attends l’arrêt qui doit me rendre à jamais le plus infortuné ou le plus heureux des hommes.