Page:Les Œuvres de Jean Godard, volume 5, tome 1, 1594.djvu/245

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

XC.

Nefuis-ie pas bienfol, de tant & tant eferire,
Et de compofer tant de carmes & de vers,
Puis quilzfont regardezfeulement de trauers
D’une fiere Beauté, qui ne s’enfait que rire ?
Puisque vous ne daignés pasfeulement les lire,
Belle, pour qui ie fens tant de tourments diners,
Iamais ils ne courront par ce rond vniuers
Annonçant vos beautés, & mon cruel martire.
Par defpit ie m’en vay les ietter dans lefeu :
Ab ! non re me defdy, brufler ie ne lespeu :
Ivoyant voftre nom ie n’ay pas le courage.
Celapourtant ne doit m’efmouuoir nullement :
Vousfaites bien brufler mon cœur incessamment,
Bien que detous coftez peinte yfoit vostre image.


XCI

Hyer aprez diſner troys heures enuiron
Ie ſurpris en dormant dans ſa chambre m’amie,
La perleuſe fueur de ſa face endormie
Alloit le long du ſein roulante en ſon giron.
Cupidon l’eſuentoit auec ſon aileron :
Son ſein & ſa poitrine estoit nue à demie.
Tellement qu’on voyoit ſur ſa glace affermię
Ainſi qu’on mont de lait ſon tettin ferme & rond.
Les Zephyrs eſuentoyent ſes cheveux par ondees :
Les Amours volletoyent ſur ſes leures bordees
De roſe, & toutesfois de peur de l’eſueiller,
Ie n’oſay pas baiſer ſon teint de lis & fraiſe :
Car fi au doux ſommeil elle trouuoit de l’aiſe
Et moy encore plus à la voir ſommeiller.