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Page:Les Œuvres libres, numéro 14, 1922.djvu/336

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rappelle que sa femme en était probablement un pour lui et qu’il n’avait que de l’antipathie pour elle, il me semble…

— Précisément, et à moi aussi.

— Mais comment avez-vous su la nature de ses relations avec l’institutrice ?

— Là, Watson, j’ai bluffé, simplement bluffé. La lettre de Gibson était d’un accent si passionné, elle avait si peu le style convenu, le ton d’une lettre d’affaires ; en revanche Gibson lui-même s’imposait une surveillance telle, et si apparente, que cette contrainte m’éclaira sur la profondeur d’une émotion qui s’adressait bien plus à l’accusée qu’à la victime. Pour parvenir à la vérité, il fallait d’abord être fixé sur les relations qu’avaient entre eux le mari, la femme et l’institutrice. Attaqué de front, vous l’avez vu, Gibson n’a pas bronché. C’est alors que j’ai recouru au bluff, en lui donnant l’impression de la certitude là où je n’avais que de fortes présomptions.

— Peut-être Gibson reviendra-t-il.

— N’en doutez pas, il reviendra. Il est tenu de revenir. Il ne peut s’en dispenser au point où en sont les choses. Mais il me semble qu’on sonne ? Oui. Et voilà un pas que je reconnais… Ah ! parbleu, monsieur Gibson, je disais dans ce moment même au docteur Watson que vous commenciez à être en retard.

— J’ai réfléchi, monsieur Holmes, je me suis trop hâté de prendre en mauvaise part vos paroles. Vous avez raison de vous attacher ainsi aux faits quels qu’ils soient, et cela me confirme dans la bonne opinion que j’ai de vous. Mais je puis vous affirmer que mes relations avec miss Dunbar ne touchent en rien à cette affaire.

— C’est à moi d’en décider, n’est-ce pas ?

— Je vous l’accorde. Vous êtes comme un chirurgien qui, pour formuler son diagnostic, a besoin de connaître tous les symptômes.