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Livre I. Chapitre III.

les biens de la terre ne l’occupent pas ; ils n’attirent pas son amour ; ils ne peuvent avoir aucune entrée en son cœur ; ils ne lui font aucun préjudice — Aussi est-ce la seule volonté et le seul désir qui lui nuisent.

Voilà la première nuit dont l’ame est environnée selon la partie inférieure de l’homme. Il faut maintenant voir combien il lui est utile ; si elle se porte à l’union divine, de sortir de sa maison, pendant que l’obscure nuit des sens dure.

CHAPITRE QUATRIÈME.
Combien il est nécessaire à l’ame de passer par la nuit obscure des sens, c’est-à-dire, par la mortification des passions, pour aller à l’union divine.

Il est nécessaire que l’ame qui tend à l’union divine passe par la nuit obscure, c’est-à-dire, par la mortification des passions et par le renoncement des plaisirs que les créatures peuvent nous faire goûter, parce que l’amour qu’on a pour elles paraît devant Dieu comme des ténèbres qui rendent l’ame incapable de recevoir la pure lumière de Dieu ; car la lumière ne s’accorde pas avec les ténèbres, puisque, comme dit S. Jean, la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas comprise.[1]

  1. Lux in tenebris lucet, et tenebræ eam non comprehenderunt. Joan., 1. 5.