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romain à Corinthe, et l’on ne prêtait plus nulle attention à ce titre : un privilège que chacun possède n’étant plus un privilège. Myrrhine resta seule avec les stationnaires. Le centurion lui dit :

— Donne-nous les livres !

— Quels livres ? demanda-t-elle stupéfaite.

— Les livres chrétiens que tu as en ta possession, et que tu as détournés du séquestre ordonné par Sa Divinité. La dénonciation est formelle.

— J’ignore, répondit-elle sincèrement, ce que vous voulez dire.

— On sait même où tu les caches !

Le centurion haussait les épaules. Il fit signe à l’un des stationnaires, Syrien dont le nez pendait comme une trompe, mais aux yeux aigus, qui différait des autres. S’étant fait indiquer la chambre de Myrrhine et de Théoctène, cet homme se dirigea, sans hésiter, vers le coffre.

— Voilà les livres ! annonça-t-il presque tout de suite.

Les grands moments de la vie sont presque toujours les plus brefs. Celui-ci qui devait décider de l’existence de Myrrhine, n’avait pas duré plus de quelques minutes. On lui mit aux pieds une entrave de chanvre, et, à ses deux mains liées ensemble une corde pour la tirer. C’est ainsi qu’on avait coutume de conduire au tribunal les personnes de condition inférieure. Elle ne versait que peu de larmes, mais pouvait à peine marcher, dans une telle angoisse qu’elle en avait presque perdu le sens.

On fouilla le reste de la maison. L’Africaine dut livrer le coffre aux bijoux, dont le centurion fit dresser un inventaire fort incomplet. Cela lui permit de garder les plus précieux qu’il partagea avec ses hommes, et surtout le Syrien : c’était le bénéfice de son métier.

Quand Myrrhine sortit, Théoctène se précipita. Ses amis ne l’avaient pas abandonné :