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chambre avant la messe et caché sous quelque meuble, puis installé ensuite avec l’aide d’un domestique complice.

Mais le cercueil mesure 0 m. 75 de hauteur, aucun meuble ne l’eût dissimulé complètement. Le commandant songe encore à l’hypothèse de la fenêtre : celle-ci, certes, est accessible à quelqu’un qui y appuierait du dehors une longue échelle d’une dizaine de mètres environ ; toutefois, le clair de lune pendant cette nuit macabre eût éloigné des abords de la maison des remparts le coquin le plus audacieux. Quant à faire monter et à introduire de cette manière un fardeau de pareille taille, personne ne l’eût entrepris non plus.

En voyant les efforts de ces braves gens pour découvrir la vérité, on est stupéfait de constater qu’ils ne songent pas à une autre hypothèse : celle des caves, si immenses, si profondes, si mystérieuses ? Personne n’en souffle mot.

M. de Saint-Cast, lorsqu’il fut las de réfléchir à son malheur, questionna les domestiques de sa maison, pour la plupart vieilles gens attachés depuis longtemps à son service, jusqu’ici tenus pour bien braves, mais que sait-on ?

Il interrogea donc son homme de confiance, Yves Laguenic, âgé de soixante ans, qui avait navigué vingt ans à ses côtés, partagé sa captivité en Espagne au temps du grand Empereur, et servi comme quartier-maître sur la frégate La Désirée, qui le ramena en France ; puis ce fut le tour de Marie Mordreuch, la cuisiniere, veuve, quarante-cinq ans ; de son fils Jeannic, jeune garçon de seize ans, trapu et roux de poil, servant aux cuisines et à l’office ; ensuite vint Bouvard, le valet, homme d’âge qui avait connu le père du commandant et sauvé les papiers de la famille en 1793 ; enfin la jeune Agathe Coursier, dont on