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nand Gregh. Souvent il exhaussait à la main une édition luxueuse, cubique et incarnadine, où il récitait, dieu paternel, une strophe de quelqu’un de ses hôtes. Il se tenait beau, magnifique et bon. De ces visites chez le dernier grand Parnassien Daniel Vernalle revenait comme de la Montagne, grisé d’inspiration, de rythmes, d’espérance… C’était l’époque où les plus lyrique Étrangers s’imprimaient d’abord à Paris, où le chantre des Vierges aux Rochers proclamait sur le monde moderne, dans les sonorités orgueilleuses de la langue des Doges, l’hégémonie sacrée sur toutes classes d’hommes de l’Écrivain, du Poète, du Héros de l’âme.

Ce fut José-Maria de Héredia qui fit publier ses premiers livres. Or, ce ne furent point des vers !… Il était trop impatient, et l’avidité de caresser, en les modelés les plus exacts, ses visions d’êtres florissants, le ravit à la poésie. Il sera romancier ! L’homme a sa Béatrice, La Vie du Cygne, Le Roman de Ronsard. On y sentit la chaleur du Désir et du Don, et ils eurent du succès : le papillonnant public, à travers les préoccupations de style qui lui déplaisent le plus, est attiré à la flamme ! La vie de Daniel Vernalle était une brûlante force, avide d’action quoique insoucieuse d’ambition, qui de vingt à ses trente ans actuels se satisfit donc avec feu d’écrire. On goûtait que, malgré une sensibilité impérieuse, s’effaçant par amour même, il présentât les jeunes corps et leurs âmes dans leur intimité ineffable.

« Mais vit-il personnellement ? quelle vie cache-t-il ? » se demandaient confrères, parents, très intrigués. Ils n’arrivaient pas à savoir s’il avait de marquantes amours et dans quels milieux, encore qu’ils perçussent à son visage pâle et vibrant l’expérience d aventures peut-être courtes mais suprêmes. Pas de violence ; de la véhémence :