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je serais heureux de travailler, mais on n’embauche pas… Ayez pitié, monsieur… Voilà deux jours que je n’ai pas mangé…

Piotr. — Je regrette… Je n’ai pas de petite monnaie

Maria, à Vania. — Va, mon chéri, dans mon sac, sur le guéridon, près du lit, tu trouveras mon porte-monnaie, prends-le, et apporte-le-moi.

(Vania, sans écouter sa mère, ne détache pas les yeux du mendiant et ne bouge pas.)

Maria. — Vania ! M’entends-tu ? (Elle le tire par la manche.) Vania ! va me chercher mon porte-monnaie, il est dans mon sac, sur le guéridon, près du lit…

Vania. — Tout de suite. (Il sort en courant.)

Piotr, au mendiant. — Attends… (Le mendiant se met à l’écart.) C’est effrayant comme il en passe de ces sans-travail… Ah ! la paresse.

La Princesse. — On dit que c’est la même chose à l’étranger. J’ai lu qu’à New-York, il y a cent mille sans-travail.

Maria, à Piotr Semionovitch. — Encore une tasse de thé ?

Piotr. — Volontiers… Mais très léger…

(Le mendiant les regarde, hoche la tête et toussote pour attirer l’attention.)

Vania, accourt avec le porte-monnaie qu’il remet à sa mère et, de nouveau, reste le regard fixé sur le mendiant. — Voilà !

Maria, elle prend dix kopek qu’elle tend au mendiant. — Tiens, prends…

Le Mendiant, salue et prend la monnaie. — Merci… merci d’avoir eu pitié d’un pauvre homme.

Piotr. — C’est bien, mais si vous aviez travaillé, vous ne seriez pas dans cette misère. Celui qui travaille n’est jamais pauvre.

Le Mendiant, prend son bonnet et, en s’éloignant, dit. — Le travail, ça ne rend pas riche, mais bossu… voilà la vérité.

Vania. — Que dit-il ?