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Page:Les œuvres libres - volume 42, 1924.djvu/148

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Le Docteur. — Anormal ! Anormal ! Vous refusez d’accomplir le service militaire. Pourquoi ?

Boris. — Je suis chrétien et je ne puis pas tuer.

Le Docteur. — Soyons sérieux ! il faut défendre la patrie contre les ennemis, vous le savez bien ; il faut aussi tenir en respect ceux qui troublent l’ordre public.

Boris. — Personne n’attaque la patrie. Ceux qui troublent l’ordre, ce sont les gens du gouvernement plutôt que ceux qu’ils poursuivent.

Le Docteur. — Bah ! Vous plairait-il de m’expliquer ?

Boris. — Par exemple, une grande cause de désordre, c’est l’alcool. Or, qu’est-ce qui vend l’alcool ? c’est le gouvernement. C’est lui encore qui répand une religion fausse, menteuse. Et le service militaire, ce service que l’on exige de moi ? n’est-ce pas la cause, la cause capitale de la dépravation ? C’est pourtant le gouvernement qui nous y oblige…

Le Docteur. — Il ne faudrait donc, selon vous, ni gouvernement, ni État ?

Boris. — Je n’en sais rien, mais je sais bien que je ne dois point participer au mal.

Le Docteur. — Que deviendrait le monde alors ? Car la raison nous est donnée afin de prévoir l’avenir.

Boris. — La raison nous est donnée également pour comprendre que l’organisation sociale doit être fondée non sur la violence, mais sur le bien. Il est clair aussi que le refus d’un seul de participer au mal ne présente aucun danger.

Le Docteur. — Eh bien, permettez-moi de vous examiner un peu maintenant. (Il l’ausculte.) Vous ne ressentez aucune douleur ici ?

Boris. — Non.

Le Docteur. — Ici non plus.

Boris. — Non.

Le Docteur. — Respirez ! Ne respirez pas. Je vous remercie. Permettez maintenant. (Il prend