Page:Les œuvres libres - volume 42, 1924.djvu/164

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grand tort ! Il n’en est pas moins vrai qu’elles ont songé à rompre avec nous… Nous avons eu grand mal à conserver nos relations… Alors si, tout à l’heure…

Nicolas. — Crois-tu que je serais l’ami d’Alexandre Petrovitch s’il n’était pas un brave homme ?

Luba. — Ce n’est point la question. Mais par vos costumes, par vos manières, vous semblez blâmer ceux qui viennent ici. N’est-il pas naturel qu’ils s’en offensent ? Nous vivons dans un milieu social. Nous devons nous soumettre à ses lois, sinon, il faut établir son existence ailleurs…

Nicolas. — Tu l’as dit !

Alexandre. — À moins qu’on ne reste dans ce milieu pour montrer la vérité à ceux qui nous entourent.

Luba. — Cette conquête des âmes est bien dangereuse et elle est éphémère.

Nicolas. — Pas toujours !

Luba. — Cependant notre pope…

Nicolas. — Vassili !

Luba. — Il avait rompu avec l’Église ! Il était prêt à affronter le martyre ! Quelques mois de pénitence dans un couvent et il a imploré de l’archevêque son pardon.

Nicolas. — Est-ce bien vrai ?

Luba. — Il a fait sa soumission.

Alexandre. — Le malheureux !

Nicolas. — Oui, malheureux ! De nouveau ils l’ont séduit. Il n’a plus distingué la vérité du Mensonge ?

Luba. — Il avait sans doute le désir de vivre tranquille avec sa femme et ses enfants. Et qui pouvait le lui reprocher ?

Nicolas. — Dieu !

Luba. — Qu’en savons-nous ? Dieu nous a-t-il donné cette existence pour souffrir ? Ne nous a-t-il proposé des joies que pour nous amoindrir ? Est-il donc un père qui se plaît à prendre au piège ses enfants ?