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VI
la maison flottante — les serpents à sonnettes.


Je voulais explorer un endroit que j’avais remarqué au beau milieu de mon île durant ma promenade de la veille. Jim se décida à me suivre, et nous fûmes bientôt arrivés, car l’île Jackson n’a que trois milles de long. L’endroit en question était une crête qui s’élevait à une hauteur de quarante pieds environ. Nous eûmes de la peine à grimper. La pente devenait de plus en plus raide à mesure que nous montions et les buissons épineux nous barraient parfois la route. Parvenus au sommet, nous nous trouvâmes en face d’une caverne creusée dans le roc et qui s’ouvrait du côté du Missouri. Elle n’était pas très grande ; mais Jim pouvait s’y tenir debout et on n’y avait pas trop chaud. Mon compagnon parut ravi de cette découverte. Il me proposa de repartir aussitôt pour emménager nos provisions et nous installer dans la grotte.

— Il n’y a qu’à amarrer le canot juste en face de l’endroit où nous sommes, me dit-il. D’ici, je verrai arriver les curieux de loin, s’il en vient, et nous serons sur la côte de l’Illinois avant qu’ils aient abordé. Et puis les oiseaux nous ont avertis qu’il va pleuvoir. Quand la pluie tombe dans cette saison, elle tombe bien ; les provisions seront perdues.

Je n’avais pas besoin de l’avis des oiseaux pour deviner que le temps allait changer, et je savais aussi que les gens qui se mettraient en quête de Jim partiraient de Saint-Pétersbourg, c’est-à-dire du côté du Missouri. Je me laissai donc convaincre. La barque, amenée jusqu’au milieu de l’île, fut cachée sous les saules. Jim se chargea de ce qu’elle contenait et regagna la caverne, où je ne tardai pas à le rejoindre avec deux poissons qui avaient mordu à nos lignes.