Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/95

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Je fus quelque temps, depuis une heure jusqu’à deux, à discourir avec elle sur diverses particularitez qui se presentoyent ; enfin, sur les deux heures on commença de frapper à la porte : cela me fit resserrer subtilement dans l’estude prochaine, qui respondoit sur le chevet du lict, d’où je pouvois facilement et contempler les actions des femmes et entendre leurs discours. La chambre bien parée, et les siéges dressez, la compagnie entre, chacun prend sa place, on se saluë, et demeurèrent quelque temps sans rien dire, comme par ceremonie et par respect l’une de l’autre ; toutesfois, comme les langues des femmes ne peuvent demeurer arrestées, n’y ayant rien de plus mobile qu’elles, une damoyselle d’auprez de la porte Sainct-Victor s’avança de dire : Vramy, Mesdames, vous estes bien ceremonieuses ; s’il vous arrivoit ce qui m’arriva l’autre jour, sur les onze heures du soir, devant les Carmes deschaussez, vous ne parleriez jamais de ceremonies : j’y fus entièrement bruslée ; c’est la raison pourquoy je n’ai pas deffait mon masque en entrant2, car je ne suis pas encor guarie tout à fait.

— Comment, ma cousine, respondit une jeune mariée, estiez-vous à ce feu ? Je ne vis jamais un


2. V. plus loin une note sur l’usage des masques, p. 105, et la Promenade du Cours, Paris, 1630, in-12, p. 12 ; Lémontey, Suppl. à Dangeau, p. 140–141.