Page:Les Eddas, trad. Puget, 2e édition.djvu/109

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58. Æger dit : Tous ces noms me semblent obscurs. Mais comment les Ases s’emparèrent-ils de l’hydromel de Suttung ? — Brage répondit : Voici ce que l’on raconte à ce sujet. Odin se mit en route et arriva dans un endroit où neuf esclaves fauchaient de l’herbe ; il leur proposa d’aiguiser leurs faux. Les esclaves y consentirent, et Odin tira de sa ceinture une pierre à aiguiser, avec laquelle il donna le fil aux neuf faux. Les esclaves, trouvant, en effet, le travail beaucoup plus facile, demandèrent à acheter cette pierre. Odin répondit que pour l’avoir, il fallait en donner un bon prix ; les esclaves offrirent de l’acheter. Alors Odin jeta la pierre en l’air, et, tous voulant la saisir, ils en vinrent à se battre avec tant d’archarnement qu’ils s’entre-tuèrent avec leurs faux. Odin chercha un gîte chez le géant Bœge, frère de Suttung. Bœge se lamenta sur sa position ; ses neuf esclaves venaient de périr, et il ne savait où trouver maintenant des ouvriers. Odin prit le nom de Bœlverk et offrit de se charger du travail des hommes tués, à condition que Bœge lui procurerait une gorgée de l’hydromel de Suttung. Bœge répondit que la chose n’était pas en son pouvoir, son frère voulant jouir seul de cette boisson ; mais il promit d’accompagner Bœlverk et d’essayer s’il ne serait point possible de lui en procurer. Durant tout l’été, Bœlverk fit la besogne de neuf hommes, et lorsque vint l’hiver, il demanda sa