Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/289

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sont honteuses; chez toi, par une dépravation et une perversité toutes contraires, ce seront les principes qui seront honteux, et les actions qui seront honorables.

Au nom du ciel, te représentes-tu une ville d’Epicuriens? « Moi je ne me marie pas (dit l’un)! Ni moi non plus (dit l’autre)! car il ne faut pas se marier. » Mais il ne faut pas non plus avoir d’enfants, ni s’occuper du gouvernement. Qu’arriverat-il donc? D’où viendront les citoyens? Qu’est-ce qui les instruira? Qui sera le surveillant de la jeunesse? Qui sera son maître de gymnastique? Qui se chargera de son éducation? Lui donnera-t-on l’éducation des Lacédémoniens, ou celle des Athéniens?

Prends-moi un jeune homme, et élève-le suivant tes principes! Mauvais sont tes principes: ils sont le bouleversement des États, le poison des familles, le déshonneur des femmes. Homme, renonces-y! Tu vis dans une ville capitale; il te faut être magistrat, rendre équitablement la justice, t’abstenir du bien d’autrui, ne trouver belle aucune femme que la tienne, ne trouver beau aucun jeune garçon, aucun objet en or ou en argent! Cherche des principes d’accord avec ceux-là; et, en partant d’eux, tu te passeras gaiment de tant d’objets si propres à nous attirer et à triompher de nous! Que n’arriverait-il pas, au contraire, si aux séductions des objets nous ajoutions avec toi l’invention d’une philosophie, qui nous pousse vers eux et accroît leur puissance?

Dans un vase d’argent ciselé, qu’est-ce qui a le plus de prix, la matière ou l’art? (évidemment