Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/328

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il y faut même un certain extérieur, et, avant tout, que ce soit Dieu qui vous pousse à prendre ce rôle, comme il poussait Socrate à réfuter les erreurs, Diogène à réprimander avec un ton de roi, Zénon à enseigner et à dogmatiser. Toi, tu ouvres une boutique de médecin, sans posséder autre chose que les médicaments: car tu ne sais pas comment les appliquer, ne l’ayant pas étudié. « Un tel tient des onguents, dis-tu; et moi aussi j’en tiens. » Mais possèdes-tu donc aussi l’art de t’en servir? Sais-tu quand et comment ils peuvent être utiles, et à qui? Pourquoi donc te jouer ainsi des choses les plus importantes? Pourquoi agir à la légère? Pourquoi entreprendre un métier qui ne te convient en aucune façon? Laisse-le à ceux qui le connaissent, et qui savent le faire. Ne veuille ni déshonorer la philosophie par toi-même, ni faire partie de ceux qui la calomnient. Si tu prends plaisir à ses enseignements, assieds-toi, et médite-les en toi-même, mais ne te prétends jamais philosophe, et ne souffre pas qu’un autre t’en donne le nom. « Il se trompe, dois-tu dire; car je ne désire pas d’une autre manière qu’auparavant, je ne veux pas d’autres choses; je ne juge pas différemment; et dans l’usage que je fais des idées, je n’ai rien changé à ma façon antérieure. » Voilà ce que tu dois penser et te dire sur ton propre compte, si tu veux penser juste. Sinon, continue de jouer et de faire ce que tu fais; ce la est digne de toi!