Page:Les Français peints par eux-mêmes - tome I, 1840.djvu/91

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ilaijs la véritable ar«>p(ion du lonuc , im iii()r :il cdiniiic au pliysicjuo ; l’cnI cIoiu- de lui (jue je vais parler.

riiéodore, sur la lèle que je viens de dire , a d’aliord un chapeau des plus extraordinal ics i|ue l’on ])uisse imaginer, aussi iarize des bords (|ue possible, et il ne se peut plus pointu. Oe chapeau fut noir autrefois, cela est incontestable ; mais, liélas ! |M)ur le croire, il faut l’avoir vu. Aujourd’hui, l’infortuné chapeau, soil effet de l’usage, soil la quanlilé de poussière qui le recouvre, tourne au gris d’une façon déplorable. Des boi<ls de ce chapeau sort h flots farouches une chevelure comme on n’en vit jamais la pareille : longue, embrouillée, sèche, tout a la fois. Est-ce par économie (|ue Théodore laisse prendie a ses cheveux une taille si extraordinaire ? Mon Dieu non ! Par fatuité’ :* pas davantage. Théodore n’est peut-être pas bien sur de la. couleur précise de ses cheveux. Il a vu des portraits de peintres célèbres où ces maîtres étaient représentés les cheveux floltanis sur les épaules : voiPa (ouïe sa raison. Il s’est demandé poui<|uoi lui aussi . qui deviendra un grand peintre, il ne prendrait point par anticipation le coslume des maîtres. D’autres choses l’embairassent , il est vrai : la cravate , par exemple, qu’il jetterait volontiers au diable pour montrer son cou, qu’il croit tout aussi agréable que celui de Raphaël : par malheur, ô fimeste résultat d’une mauvaise habitude ! l’absence de cravate lui cause de violents maux de dents. Il voudrait bien encore se vêtir d’une façon originale et fantasque, toujours a l’exemple des peintres du seizième siècle ; mais c’est tout au plus s’il a de quoi payer le simple et infâme coslume, comme il l’appelle, dans lequel il est emprisonné. Donc, de tous les souhaits que forme Thinidore pour sa toilette, le seul qu’il puisse réaliser a son aise , c’est de porter de longs cheveux ; aussi en use-t-il largement et sans scrupule. Quant "a son habit, boutonné jusqu’au menton, il resie couvert de cendie, de conleui-sel de lâches d’huile, en si^ne d’aflliclion. l’.l au fait, il Huit être juste : la vie que mène Théodore n’est pas fort divertissante ; elle ne saurait guère pousser le cœur et le visage à l’épanouissement. Levé a sept heures du matin, Théodore est ’a sept heures et quelques minutes chez son seigneur et maître , monsieur le peintre un tel ou un tel. On vient de voir que ce ne sont point les soins à apporter "a sa toilette qui pourraient ici compromelire l’exactitude de Théodore. Arrivé chez son maître, Théodore met l’atelier en ordre, y introduit de l’air, si l’on est en été ; si l’on est en hiver, il allume le poêle et l’enfourche avec les bras et avec les jambes. Midi sonnant, Théodore, en quelque saison que l’on soit , s’en va au musée faire des copies pour son maître. C’est là qu’il faut le voir, se promenant avec dédain devant les toiles qui ne rentrent pas dans le système de son maître , et s’extasiant , au contraire , devant celles que son maître lui a commandé d’étudier. Théodore, en ces moments, prend un air capable ; il regarde du coin de l’œil , et en haussant les épaules , et en imprimant à ses lèvres un sourire de compassion, ceux qui font mine d’admirer ce qu il dédaigne , ou de dédaigner ce qu’il admire. C’est alors, surtout, que Théodore regrette de n’avoir pas de moustache ’a retrousser avec un geste de supériorité cavalière. —Sa petite visite des tableaux les plus importants une fois faite . il s’installe devant la toile qu il doit copier. Tout en ouvrant sa boite . ou en essayant ses crayons , ou en préparant ses cou-