Page:Les Gaietés de Béranger.djvu/140

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Là, sans pitié, le deuil et la critique
Font un concert de leurs pleurs, de leurs cris,
Et l’on retrouve encor la politique
Y dispensant l’éloge et le mépris.

La jeune fille, au tombeau de sa mère
Fixe la fleur que sa douleur tressa,
Et l’élégant dépose aux pieds d’un père
Celle au rabais qu’un marchand lui laissa.

L’ambitieux s’abandonne aux chimères
Près de celui qu’elles ont ballotté ;
Plus loin le grand des faveurs mensongères
Rêve en tremblant sur l’instabilité.

J’ai vu Mondor, en brillante livrée,
Avec orgueil y choisir le limon
Où, confondant sa dépouille titrée,
Demain l’oubli prendra soin de son nom.

Mais pénétrons dans ce champ de silence
Pour admirer ces pieux monuments :
On n’y voit pas éclater la science,
Mais on y rend hommage aux sentiments.

Le vieux tombeau d’Abélard, d’Héloïse,
Vient rappeler l’amour le plus touchant ;
Mais depuis eux, faut-il que je le dise ?
Amour chez nous n’est plus aussi constant.