tendre de son confesseur. — Oui, mignonne,
répondit le père en se passionnant et en lui
donnant de petits coups sur la joue, si vous
m’accordez ce que je vous demande. — Hélas !
mon père, s’écria cette belle fille en rêvant,
que la proposition que vous me faites
m’embarrasse : mon père a dessein de me
marier en bref au marquis de…, qu’il regarde
déjà comme son gendre, et s’il venoit
à reconnoître la folie que j’aurois faite, je
serois perdue pour jamais. — Que vous êtes
innocente, mon petit amour, et que vous
ajoutez peu de foi à mes paroles, repartit le
jésuite en riant. Appelez-vous folie un passe-tems
qui donne tant de plaisir ? Ne vous
ai-je pas dit que j’avois un secret pour empêcher
que l’on ne remarque quand une fille
a perdu ce qui vous inquiète, que nous appelons
la doctrine de saint Denis ? Je ferai
en sorte que monsieur votre père, qui est
de mes bons amis, vous fasse marier par un
des moines de cette abbaye, et quand vous
auriez donné plusieurs fois les dernières faveurs
à tous vos galans, je défie au plus
rusé d’y pouvoir rien connoître. — À la vérité,
mon cher père, reprit la demoiselle
comme surprise, voilà une science admirable,
et qui mérite bien qu’on l’apprenne.
Combien y a-t-il de pauvres filles qui souffrent
le martyre amoureux n’osant se plaindre,
et qui pourroient se soulager s’ils la
savoient sans qu’on le pût savoir. — Je vous
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EN BELLE HUMEUR