ne crois pas que ce soit un jésuite qui ait
aujourd’hui baisé madame. — Comment, par
la mort, coquin, que dis-tu là ? reprit le marquis
en lui voulant donner un soufflet ; est-ce
que cette impudique en voit plus d’un ?
Ah ! la bonne bête, ah ! la scélérate ! En achevant
ces mots il courut vite à la chambre
de sa femme, et donna un si grand coup à la
porte qu’il l’enfonça. Le père gardien qui
étoit encore au lit nu en chemise, voyant
entrer le marquis les yeux tout brûlants de
colère, l’épée à la main, se trouva fort surpris,
et n’ayant pas eu le tems de prendre
ses habits, il sauta par une fenêtre qui donnoit
sur la rue, tomba sur la tête d’un crieur
d’oublis qu’il blessa, et se sauva tout nu
dans un couvent de religieux de ses amis qui
n’étoient pas moins sujets aux foiblesses humaines
que lui.
Le mari au désespoir d’avoir perdu sa prise, se jeta aussitôt sur le justaucorps bleu galonné et sur les culottes de broderie que le pauvre jésuite fugitif avoit laissés dans le fauteuil à côté du lit, et les ayant examinés, il ne put reconnoître à qui ils appartenoient ; après quoi il chargea sa femme d’injures et de coups fort sensibles, et sans le valet qui l’accompagnoit qui lui arrêta le bras, il l’auroit tuée sur place pour satisfaire à sa vengeance. Mais étant revenu de sa fureur, il la fit monter en carrosse sur l’heure, malgré toutes les caresses qu’elle lui put faire,