Page:Les Lois de Manou, trad. Strehly, 1893.djvu/21

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sur lesquelles il s’appuie ont un caractère beaucoup trop conjectural pour qu’on puisse considérer comme acquis à l’histoire les résultats auxquels il est parvenu. Voici les principaux points de son argumentation : nous avouons qu’elle ne nous a guère convaincu. Les doctrines philosophiques de Manou sont directement inspirées du fameux système athéiste Sânkhya attribué au sage Kapila. Or, cette doctrine aurait fleuri[1] entre 100 avant J.-C. et 700 de notre ère, époque à laquelle elle fut supplantée par le système Védânta. D’autre part le témoignage de Medhâtithi précédemment rapporté donne à supposer que le texte de Manou existait au Ve ou au VIe siècle de notre ère. L’addition du chapitre VII concernant la politique et la conduite des rois, qui forme un accessoire étranger aux anciens Dharma Soutras, prouverait que le livre a été composé pour servir de manuel à un roi, et vraisemblablement à quelque roi puissant et protecteur des lettres. Les troubles qui désolèrent l’Inde au premier siècle de notre ère forcent à rejeter après cette époque la date de la composition du Dharma Sâstra et à la placer entre 100 et 500 après J.-C. Établissant alors un rapprochement entre la dénomination de Mânava portée par une des écoles religieuses des sectateurs du Yadjour-Véda Noir et le titre de Mânavya que prennent sur les inscriptions les rois de la dynastie des Tchâloukyas, M. Burnell serait porté à voir le protecteur et l’inspirateur d’une œuvre telle que le Code de Manou dans le fondateur même de cette dynastie, Poulakésî ou Polakésî, qui florissait vers 500 après J.-C.

Ces hypothèses sont plus ingénieuses que solides, et les conclusions auxquelles elles aboutissent sont beaucoup trop aventurées pour qu’il soit possible de les adopter sans scrupule. D’ailleurs 500 après J.-C. est une date bien récente pour

  1. Cela n’est pas absolument sûr.