Page:Les Merveilleux Voyages de Marco Polo, éd. Turpaud, 1920.djvu/107

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en personne qu’une seule fois, en l’an 1286 du Christ. Je vais vous dire pourquoi.

Il y avait un grand seigneur tartare nommé Nayan, oncle de Koubilaï-Khan. Encore jeune, il commandait à beaucoup de territoires et de provinces. Sa jeunesse et sa puissance l’emplirent d’orgueil, car il pouvait mener à la bataille trois cent mille hommes à cheval. Toutefois il était vassal de son neveu, le grand Khan Koubilaï et le droit exigeait qu’il lui fût soumis. Mais se voyant si puissant, il voulut secouer son vasselage et s’emparer du trône. Il fit part de son dessein à un autre seigneur tartare, Caïdou, qui était, lui, neveu du grand Khan. Caïdou était révolté et haïssait son seigneur et son oncle. Nayan lui manda qu’il s’apprêtait à marcher contre Koubilaï avec toutes ses forces qui étaient considérables : il le priait de s’armer, lui aussi, et de marcher de son côté : tous deux, avec des armées si puissantes détrôneraient l’empereur.

Quand Caïdou reçut le message de Nayan, il en fut tout joyeux et se hâta de lui faire parvenir son agrément. Il s’apprêta donc et rassembla cent mille cavaliers.

Or le grand Khan apprit toute cette machination. Il fit très vaillamment ses préparatifs, en homme qui ne craignait pas ses ennemis, étant sûr de son droit. Il déclara qu’il ne porterait jamais la couronne s’il ne mettait à mort ces deux seigneurs traîtres et déloyaux. Il s’arma en dix à douze jours, avec tant de diligence et de secret que nul n’en sut rien en dehors de son conseil privé. Il rassembla trois cent soixante mille