Page:Les Ravageurs, Jean-Henri Fabre.djvu/56

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
46
LES RAVAGEURS

mérité ; je suis sûr que l’orme où vous avez pris la bête est un arbre perdu.

Jules. — Je le crois bien. Il n’a pas mon plein chapeau de feuilles, et encore sont-elles jaunes. Sous l’écorce, tout est vermoulu.

Paul. — Le cossus est d’autant plus redoutable que nous avons peu de moyens d’en défendre les arbres. La première année, quand la chenille encore jeune ronge la couche superficielle du bois, on soulève l’écorce d’où s’échappe de la vermoulure et l’on atteint sans peine l’ennemi ; mais plus tard, quand a chenille s’est enfoncée dans les profondeurs du tronc, il est impossible de l’en déloger. Pour diminuer au moins la détestable engeance, le moyen le plus efficace est de faire la guerre au papillon, qui apparaît en juillet et s’accroche au tronc des arbres où la chenille a vécu. Vous voyez alors combien il importe de connaître ce papillon, pour le détruire toutes les fois que l’occasion s’en présente et lui faire même expressément la chasse en temps opportun.

Émile. — La chenille que nous avons apportée est bien grosse, et pourtant je l’ai trouvée sous l’écorce, et non dans l’épaisseur du bois, que le couteau de Louis n’aurait pu atteindre.

Paul. — Cette chenille venait de l’intérieur du tronc ; elle s’était rapprochée de l’écorce pour creuser la fameuse fenêtre par où le papillon s’envole. La chenille du cossus fait comme celle de la zeuzère. Quand elle sent venir le moment de la métamorphose, elle se hâte de prolonger sa galerie jusqu’à l’extérieur du tronc, pour que le papillon trouve un chemin ouvert ; puis elle rentre dans les profondeurs