L’ATTAQUE DU MOULIN
I
Le moulin du père Merlier, par cette belle soirée d’été, était en grande fête. Dans la cour, on avait mis trois tables, placées bout à bout, et qui attendaient les convives. Tout le pays savait qu’on devait fiancer, ce jour-là, la fille Merlier, Françoise, avec Dominique, un garçon qu’on accusait de fainéantise, mais que les femmes, à trois lieues à la ronde, regardaient avec des yeux luisants, tant il avait bon air.
Ce moulin du père Merlier était une vraie gaieté. Il se trouvait juste au milieu de Rocreuse, à l’endroit où la grand’route fait un coude. Le village n’a qu’une rue, deux files de masures, une file à chaque bord de la route ; mais là, au coude, des prés s’élargissent, de grands arbres, qui suivent le cours de la Morelle, couvrent le fond de la vallée d’ombrages magnifiques. Il n’y a pas, dans toute la Lorraine, un coin de nature plus adorable. À droite et à gauche, des bois épais, des futaies séculaires montent des pentes douces, emplissent l’horizon d’une mer de verdure ; tandis que,