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L’ATTAQUE DU MOULIN

— Vous avez là une vraie forteresse, disait-il. Nous tiendrons bien jusqu’à ce soir… Les bandits sont en retard. Ils devraient être ici.

Le meunier restait grave. Il voyait son moulin flamber comme une torche. Mais il ne se plaignait pas, jugeant cela inutile. Il ouvrit seulement la bouche, pour dire :

— Vous devriez faire cacher la barque derrière la roue. Il y a là un trou où elle tient… Peut-être qu’elle pourra servir.

Le capitaine donna un ordre. Ce capitaine était un bel homme d’une quarantaine d’années, grand et de figure aimable. La vue de Françoise et de Dominique semblait le réjouir. Il s’occupait d’eux, comme s’il avait oublié la lutte prochaine. Il suivait Françoise des yeux, et son air disait clairement qu’il la trouvait charmante. Puis, se tournant vers Dominique :

— Vous n’êtes donc pas à l’armée, mon garçon ? lui demanda-t-il brusquement.

— Je suis étranger, répondit le jeune homme.

Le capitaine parut goûter médiocrement cette raison. Il cligna les yeux et sourit. Françoise était plus agréable à fréquenter que le canon. Alors, en le voyant sourire, Dominique ajouta :

— Je suis étranger, mais je loge une balle dans une pomme, à cinq cents mètres… Tenez, mon fusil de chasse est là, derrière vous.

— Il pourra vous servir, répliqua simplement le capitaine.

Françoise s’était approchée, un peu tremblante. Et, sans se soucier du monde qui était là, Dominique prit et serra dans les siennes les deux mains qu’elle lui tendait, comme pour se mettre sous sa protection. Le