Page:Les Soirées de Médan.djvu/85

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terminait une porte vitrée marquée d’un numéro parlant.

Enfin on allait se mettre à table, quand le patron de l’auberge parut lui-même. C’était un ancien marchand de chevaux, un gros homme asthmatique, qui avait toujours des sifflements, des enrouements, des chants de glaires dans le larynx. Son père lui avait transmis le nom de Follenvie.

Il demanda :

— « Mademoiselle Élisabeth Rousset ? »

Boule de suif tressaillit, se retourna :

— « C’est moi.

— Mademoiselle, l’officier prussien veut vous parler immédiatement.

— À moi ?

— Oui, si vous êtes bien mademoiselle Élisabeth Rousset. »

Elle se troubla, réfléchit une seconde, puis déclara carrément :

— « C’est possible, mais je n’irai pas. »

Un mouvement se fit autour d’elle ; chacun discutait, cherchait la cause de cet ordre. Le comte s’approcha :

— « Vous avez tort, madame, car votre refus peut amener des difficultés considérables, non seulement pour vous, mais même pour tous vos compagnons. Il ne faut jamais résister aux gens qui sont les plus forts. Cette démarche assurément ne peut présenter aucun danger ; c’est sans doute pour quelque formalité oubliée. »

Tout le monde se joignit à lui, on la pria, on la pressa, on la sermonna, et l’on finit par la convaincre ; car tous redoutaient les complications qui pour-