Aller au contenu

Page:Les Veillées du couvent, ou le Noviciat d’amour, 5793 (1793).djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
133
du Couvent.

égoïsme, une dureté d’ame dont je ne fus jamais capable. Ecoute : ma bonne amie, la pauvre Louise, souffre et languit, tandis que je suis trop heureuse. Je juge de ses tourmens par ceux que j’ai endurés ; ils doivent être affreux, et mon ivresse ne sera complette que quand elle la partagera avec moi. C’est à elle que je dois mes premiers plaisirs, et je voudrais qu’elle pût me devoir ses derniers. Ne me refusez pas, ou je meurs… ma pauvre compagne ! ma pauvre Louise !…

Convenez, lecteur sentimental, que voilà un trait d’amitié digne d’être transmis à la postérité sur le marbre et l’airain. Voyez-vous beaucoup d’hommes, au sein de l’opulence, quand tout prévient et sature leurs goûts insatiables, s’occuper de ceux que la misère opprime, et gémir de ne pouvoir partager leur aisance avec les infortunés. Non, sans doute, et le sublime auteur des Epreuves du sentiment n’est pas lui-même assez pourvu de ce sentiment pour faire le bonheur des autres, puisque je sais que bien loin de faire ce qu’il enseigne, il emprunte, et ne rend pas, achete, et ne