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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

Bruno n’avait que vingt et un ans quand son maître Hérimann se retira. Malgré sa jeunesse, il s’était déjà fait une large place dans le savoir humain. Aussi l’archevêque de Reims, Gervais de Château du Loir, l’appela-t-il, et en cela il céda au vœu de tous, à recueillir l’héritage professoral du pieux docteur Hérimann. C’était avoir la main heureuse : la célèbre école de Reims ne fit que grandir en gloire, et, de toutes parts, accouraient des disciples qui, formés sous cette habile direction, devaient en grand nombre plus tard se rendre illustres à leur tour ; je ne cite que Hugues de Châteauneuf, qui devait devenir évêque de Grenoble, et Odon de Lagery, qui devait devenir le grand Pape Urbain II. Nous les retrouverons tous les deux : lorsque Dieu veut faire un homme qui doit exercer une grande action à travers les hommes, dès longtemps il dispose et prépare les voies.

C’est à ce moment de sa vie que l’illustre écolâtre de Reims conquiert les plus beaux titres de gloire, en produisant deux œuvres magistrales, l’Exposition des Psaumes et le Commentaire des Épîtres de saint Paul. Rien de plus solide ni de plus lumineux, rien de plus concis ni de plus clair.

Mais voici que la vie de saint Bruno va changer : le vénérable archevêque Gervais vient à mourir, et un parent du roi de France, Manassès de Gournay, monte sur le siège de saint Remy. Homme de cour et homme de guerre, il n’a d’épiscopal que le titre ; ses désordres et ses scandales deviennent si notoires qu’il est déposé et interdit par un concile de Lyon. Cette sentence fut confirmée par Rome, et Manassès porta à Henri IV d’Allemagne tous les trésors de haine que son cœur avait accumulés contre le souverain Pontife Grégoire VII.

Bruno, qui était alors chancelier archiépiscopal, fut une des premières victimes des fureurs de Manassès ; mais avec quelques compagnons, il s’enfuit chez le comte Ebol de Roncy, qui lui offrit l’hospitalité de sa forteresse. Il resta quatre ans dans cet asile protecteur, et c’est là qu’après de longues méditations devant Dieu, l’idée lui vint de renoncer au monde. Il différa quelque temps encore d’exé-