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Page:Les anciens couvents de Lyon.pdf/616

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LA VISITATION

deux jours après. Il eut des compagnons dans la captivité, dans les supplices et dans la mort, et bien que la lettre des chrétiens de Lyon aux chrétiens d’Asie n’en nomme que quarante-huit, il n’est guère douteux qu’il y en eut un plus grand nombre. Après la mort de ces martyrs, les païens firent brûler leurs corps et jetèrent les cendres dans le Rhône. Mais les saints martyrs apparurent aux fidèles et leur dirent d’aller recueillir leurs cendres que le fleuve avait rejetées sur les bords, ce Ils y aperçurent une lumière si brillante et si agréable qu’ils connurent clairement, à sa faveur, que c’étaient ces pieuses cendres qui la produisaient. » Ils les recueillirent dans des urnes, qui plus tard, lorsque la paix fut rendue à l’Église, furent portées en triomphe dans l’église de Saint-Nizier. La fête de saint Pothin commença dès lors à se célébrer, et les miracles que l’on obtenait par l’intercession de ce premier martyr et pontife de notre cité étaient si étonnants et si communs qu’on appelait cette fête : la fête des miracles ou des merveilles.

Dans l’origine, cette fête, très solennelle et très populaire, était purement religieuse ; plus tard elle dégénéra et devint une occasion non seulement de dissipation et de légèreté, mais aussi de débauche et de libertinage : occasio luxurioepietas deputatur (Tert.). Chaque année le clergé, suivi du peuple, s’embarquait sur la Saône, au quartier de Pierre-Scise, dans des bateaux ornés de feuillages et de draperies, et descendait là rivière en chantant les litanies des saints. Arrivé vers le pont de Pierre, le cortège passait sous la seconde arche, du côté de Saint-Nizier, la plus large et la plus navigable, et du haut de laquelle on précipitait un bœuf vivant. Aussitôt mille barques se mettaient à la poursuite du pauvre animal ; on le saisissait et il était amené vers le port du Temple. Là, on le tuait, on l’écorchait, on le dépeçait, pour le distribuer au peuple. Le nom de la rue Écorche-Bœuf, qui fut longtemps celui de la rue Port-du-Temple actuelle, rappelait ce souvenir. Mais, avec le temps, cette fête dégénéra en véritables saturnales, et l’Église, alarmée de ces excès, n’hésita pas à interdire ces sortes de fêtes ; la fête de saint Pothin par là même tomba dans l’oubli. Mais quand les religieuses