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TRENTE-ET-UNIÈME AVENTURE.

Madame Hersent, s’avança jusqu’au milieu de la salle et rompit le silence général en levant clameur de la manière suivante :

« Sire, n’y aura-t-il plus de foi dans le monde ? La justice sera-t-elle méprisée ; la vérité devra-t-elle céder la place au mensonge ? Vous aviez fait publier à son de trompes que nul à l’avenir ne fût si hardi que de violer la loi de mariage ; Renart n’a pris souci de vos vœux ni de vos ordres : Renart, origine de tous les discorts, assemblage de tous les genres de malice, sans respect pour les liens d’amitié et de compérage, m’a deshonoré dans la personne de ma chère femme. Et ne croyez pas, sire, qu’une aveugle pensée de haine et de rancune me conduise auprès de vous : la clameur que je porte à votre cour n’est hélas ! que trop juste, et dame Hersent va l’appuyer de son témoignage.

— Il est vrai, sire ; » dit alors Hersent, les yeux baissés, le visage voilé de confusion, « dès que je fus en âge d’être épousée, Renart m’a fatiguée de ses poursuites. Je l’avois toujours évité, j’avois montré le plus constant mépris de ses importunités et de ses prières quand, l’autre jour, accompagnant en chasse mon noble époux, j’eus le malheur d’arriver devant sa demeure. Là, je me trouvai tellement perdue dans les défilés de son hôtel