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DIXIÈME AVENTURE.

D’ailleurs, on peut renoncer à la messe ; je n’ai pas besoin d’être tonsuré pour dire vigiles et vêpres. — Non ; mais pourtant il vaudroit mieux te donner tout de suite les Ordres : moi, je puis fort bien le faire, car, au temps passé, j’ai étudié pour être prêtre et je suis au moins diacre. Si donc je trouvois un rasoir, je te couronnerois, je te passerois l’étole au cou et je te déclarerois prêtre, sans avoir besoin de notre saint-père le Pape. — En attendant, » dit Primaut, « rien ne nous empêche de chanter les vêpres. » Les deux amis avancent vers l’autel, Primaut en longeant les murs pour y trouver le point d’appui dont il a grand besoin. Tout en l’accompagnant, Renart regardoit de côté et d’autre : derrière l’Autel des pelerins il avise une armoire, et par bonheur il y trouve un rasoir effilé, un clair bassin de laiton et des ciseaux. « Voilà, » dit-il, « tout ce qu’il nous faut ; nous n’avons plus besoin que d’un peu d’eau. »

Primaut avoit la langue trop embarrassée pour répondre. L’autre cependant reconnoît, sous la tour des cloches, la pierre du baptistère, il y puise de l’eau, et revenant à son compagnon : « Voyez, Primaut, le miracle que Dieu vient de faire pour vous ; regardez cette eau. — C’est, » dit Primaut, « que Dieu prend en gré notre service. Allons ! vîte ma