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TREIZIÈME AVENTURE.

gueur. J’ai failli, je le reconnois ; mais je vous offre satisfaction : laquelle voulez-vous ? — « Primaut, » répondit Renart, « au moins pourriez-vous bien vous dispenser de railler : si vous avez mangé seul le morceau que nous avions gagné de commun, c’est un trait de gloutonnerie qui doit vous suffire, sans que vous ayez besoin d’alléguer de méchantes excuses. Les occasions de vous amender ne manqueront pas, si vous les cherchez. — Ah ! Renart, je dis la vérité ; oui, je ressens un profond regret de vous avoir fait tort : Apprenez que je n’en ai de rien profité. Je me disposois à manger notre oison, quand tout à coup voilà Mouflart qui fond sur moi et le happe, sans me laisser le temps de le retenir. Le vilain l’a dit avec raison : entre la bouche et la cuiller il y a souvent grand encombre. J’essayai d’attendrir le vautour, peines perdues, il me répondit comme j’avois fait à vous, mon cher compain ! que je gâtois mon français, et que je ne mangerois que ses restes. N’ai-je donc pas bon sujet de me repentir de ne pas vous avoir donné part à l’oison ! mais, ami Renart, tout le monde n’est pas aussi sage, aussi honnête que vous : le fou doit faire des folies, heureux s’il a, comme moi, le repentir et la résolution de mieux agir une autre fois. Demeurons