Page:Les filles de Loth et autres poèmes érotiques, 1933.djvu/151

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— « Hola ! dit-il » la chose est grave. Écoutez-moi.
« Je m’en vais vous parler, mon cher, de bonne foi.
« J’étais bien jeune alors, quand le troupeau vorace,
« Autour de mon nombril, vint se jeter en masse.
« Chaste et naïf, je crus le mal sans gravité ;
« Je laissai ce fléau grandir à volonté.
« Si bien, qu’au bout d’un mois la phalange cruelle
« Avait posé son camp jusque sous mon aisselle.
« Les plus impatients parmi les plus gloutons
« Se jetaient, en passant, autour de mes tétons,
« Oasis dont le ciel embellit la poitrine
« Dans les steppes qui vont de l’épaule à la pine ;
« Et comme tout fléau se propage et s’accroît,
« Bientôt le triple camp se trouva trop étroit ;
« Et j’incline à penser que si Dame Nature
« M’avait doté d’un poil ou deux à la figure,
« À la face du ciel, qui s’en serait terni,
« L’escadron infernal en aurait fait son nid.
« Bientôt, ne trouvant plus d’abri sur mes domaines,
« Le reste alla chercher des places plus sereines
« Et, sans bruit, s’élançant vers un monde meilleur
« S’abattit dans les poils de mon instituteur.
« L’étique magister bientôt ne put suffire
« Au fléau dévorant : le maire en eut sa part ;
« L’adjoint vint à son tour ; le curé, vieux paillard,
« À l’instar de chacun, atteint par le vampire,
« Sans se douter de rien, dota tout le canton
« De ce levain magique appelé morpion.
« On vit alors, on vit d’héroïques pucelles
« Souffrir sans murmurer des piqûres cruelles,
« Et chercher en tremblant le coin le plus discret,
« Pour pleurer et gratter leur pubis en secret.


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