Page:Les filles de Loth et autres poèmes érotiques, 1933.djvu/55

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Elle était ravissante !… Aussi, dans cette salle,
Où pas une en beauté ne se croit de rivale,
Chacune, malgré soi, sentant ce qu’elle vaut,
Au lieu de l’admirer lui découvre un défaut :
L’une de ses cheveux critique la nuance
Et prétend hautement qu’ils frisent la garance ;
L’autre dit que sa gorge a l’air d’un mou de veau,
Et toutes sont d’accord que ce n’est qu’un chameau !

Flora, sans s’inquiéter de leurs criailleries.
D’un geste réfuta leurs sottes railleries,
Et jusques au nombril retroussant son peignoir,
Leur montra qu’étant blonde elle avait le poil noir.
Nulle autre ne fit voir une beauté pareille !…
Prises au trébuchet, toutes baissant l’oreille.
Ne purent rien trouver contre un tel argument
Et gardèrent alors un silence prudent.

La Lebrun, qu’amusait beaucoup cette aventure,
Pour sa nouvelle fille en tira bon augure :
— Petite, lui dit-elle, allons, viens te placer
Sur ce tabouret-là : je m’en vais commencer.
Pour être admise ici, sais-tu bien, ma chérie,
Qu’il faut être très forte en polissonnerie ?…
Que pour vendre l’amour il ne nous suffit pas
D’avoir de jolis yeux, d’avoir de frais appas,
Une gorge bien ferme et des fesses bien blanches ?…
Une croupe soignée, un beau cul et des hanches ?…
Qu’il faut de tous ces dons savoir bien se servir,
Savoir les employer à donner du plaisir
À ceux qui dans nos bras cherchent la jouissance,
Ensemble ou l’un d’eux seul, selon la circonstance,


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