Page:Les illégalités et les crimes du Congo, 1905.djvu/61

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Il faudrait renoncer à ce système de conquête par la force. Si nous ne colonisons que pour abrutir es nègres, périssent les colonies plutôt que le renom de la douce et belle France !

Mais, il n’en sera pas ainsi ; nous forcerons nos concitoyens et les pouvoirs publics à reconnaitre que la Déclaration des Droits de l’Homme n’a pas été faite seulement pour les blancs, mais que les nègres doivent aussi en bénéficier, et que l’esclavage qui a été aboli officiellement, ne peut plus être perpétué officieusement dans les colonies.

Que dis-je, non seulement l’esclavage existe, mais il est encore doublé, à Madagascar, de la torture et de la question. Nous apportons à Madagascar les procédés de l’Inquisition. Quelques faits :

Les nègres peuvent à peine réunir dans le courant d’une année, après un labeur sans trêve sur les placers où les chantiers des chemins de fer, 100 francs ; sur cette somme, on fait payer à certains d’entre eux jusqu’à 40 et 50 francs d’impôts. Un pauvre aveugle, accompagné de son fils qui était son unique soutien, a dû payer 73 francs d’impôts. Comme il ne pouvait les payer, on s’est cotisé et on a pu, grâce à cela, permettre à ce pauvre vieux d’achever ses jours dans sa cahute avec son unique enfant.

Si les Malgaches ne paient pas, on recourt à la torture. Dans certains endroits, on a obligé les indigènes à payer les impôts en les mettant dans l’eau jusqu’à la bouche ; quand ils ne pouvaient plus respirer, ils faisaient un signe et on les enlevait en leur prenant le peu d’argent qu’ils avaient économisé dans l’année au prix de souffrances inouïes. Une autre fois, un indigène a été plongé dans une fosse d’aisance, parce qu’il se refusait à donner un argent qu’il n’avait pas ; un jour on a mis une pierre sur la poitrine d’un indigène et on ne l’a retirée que quand ses amis se sont cotisés pour payer l’impôt qu’il devait au gouvernement.

Est-ce comme cela que l’on colonise ? (Une voix : On n’a jamais colonisé autrement). Ce système doit finir, il ne faut pas que nos colonies soient livrées à des trafiquants qui veulent gagner vite et à tout prix de l’argent et qui, partout où ils passent, font