Page:Les illégalités et les crimes du Congo, 1905.djvu/9

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d’hui à nous occuper. C’est une sorte de préface à vos importantes communications que je voudrais ébaucher

La puissance guerrière des nations occidentales venait, grâce à des inventions destructives, de faire de gigantesques progrès, lorsqu’une moitié du monde, jusque là ignorée, fut ouverte à notre petite Europe. Tous ceux qui n’avaient point nos armes, sauvages ou civilisés, furent asservis, furent broyés. Un genre de conquête tout nouveau se créa : la colonie. Conquête d’espèce nouvelle, car elle est le résultat, non plus d’un combat heureux qui, engagé entre adversaires de force, sinon tout à fait égale, au moins comparable, pouvait fort bien être un combat malheureux, mais d’une victoire qui en théorie est certaine, Ces victoires-là mériteraient le nom d’écrasement plutôt que de victoire, écrasement suivi trop souvent d’extermination complète ! En d’autres termes, disproportion absolue des forces : telle est la base stratégique, tel est le fondement solide des conquêtes coloniales. Certes, le conquérant dont je parle peut éprouver des mécomptes. Il n’est point infaillible, il croyait marcher à une conquête coloniale, par conséquent il se croyait placé en dehors des chances ordinaires de la guerre. Il s’est trompé ! — Pareil accident est très rare.

Qu’il me soit permis de rappeler ici qu’au moment même où se créait celle notion nouvelle, celle notion de colonie, il se rencontra, pour l’honneur de l’humanité, quelques âmes généreuses qui s’efforcèrent, avec un courage inlassable, d’atténuer les horreurs de ces conquêtes. Leurs efforts ne furent pas toujours vains.

La colonisation continua, d’ailleurs, de s’étendre sur le monde.

Si nous regardons les choses de haut, sans nous arrêter aux accidents de la route, nous constatons que les nations colonisatrices ont éprouvé jusqu’ici fort peu de déceptions quant à la réalisation assez rapide de leurs convoitises (je ne parle pas ici des désenchantements ultérieurs). Nous pourrions presque aller jusqu’à dire qu’elles n’ont pas éprouvé jusqu’à ces derniers temps de graves mécomptes.

Mais l’heure vient de sonner où les nations euro-