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Page:Les oeuvres poétiques de Clovis Hesteau de Nuysement 1578.pdf/115

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LIIII.



O Dieu qui as le soing, de toutes choses nees,
Qui oys les justes cris de nous pauvres mortels,
Reçoy les humbles vœus que j'offre à tes autels,
Et force les arrests des fieres destinees.

Je sçay que de noz ans les courses sont bornees,
Que noz corrps sont guidez par les corps immortels,
Et scçay que des hauts Cieux les saints arrests sont tels
Que nul ne peut sortir de leur fins terminees.

Rout est sujet au temps, & le temps à la fin,
Rien ne peut eviter la Parque & le destin,
Mais la mort, & le sort, courbent sous ta puissance.

O Dieu tu as assez de beaux astres aux Cieux,
Laisse donc luire icy le Soleil de mes yeux,
Ou s'il t'a offencé pren moy pour penitence.


LV.



Encor que le destin ayt mal-heuré mes jours,
Encor que le Ciel ait de mon bon-heur envie,
Encor qu'en languissant j'aille trainant ma vie,
Si est-ce que constant j'en finiray le cours.

Encor que mon vainqueur me tourmente tousjours,
Encor que son courroux, son brandon, sa manie,
Encor que le desdain de ma fiere ennemie,
Ayent glacé l'avril de noz jeunes amours.

Encore que de mon dueil elle soit plus cruelle,
Encor quelle paroisse à mon mal-heur plus belle,
Et que les animaux soient ravis de la voir :

Le Ciel pour la ravir la face estre immortelle,
J'honoreray mes jours mourant pour l'amour d'elle,
Car le sort & la mort sur la foy n'ont pouvoir.