Que vous ſert-il d’aymer vne beauté abſente ?
Amour inceſſamment à mes yeux la preſente.
Ie ne ſuis pas ainſi, j’ayme ce que ie voy,
I’accompagne en tous lieux ma belle Marguerite,
Elle qui reconnoist ma Foy & mon merite,
Me retenant pour ſien ſe donne toute a moy.
I’ay quelque fois esté amoureux d’vne Fille,
Qui eſt en mon pays belle, honneſte & gentille,
Mais ores me voyant eſlongné de ſes yeux,
Dont ie n’ay retenu que de foibles images
Pour donner quelque frain à mes deſirs volages,
Ie ſuis d’un autre amour doucement ſoucieux.
Vous n’aimaſtes iamais, ou vous n’eſtes prenable,
Ou l’obiet qui vous prit n’est point aſſez aymable :
Non i’en donne du tout la coulpe a voſtre esprit,
Vostre eſprit reſſemblant aux communes tabletes
Ou lon eſcrit cent fois, cent fois on les rend nettes
Pour y grauer touſiours quelque nouuel écrit.
La playe de l’Amour est du tout incurable,
Si l’aimée ne void d’vn regard pitoyable