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Andrea PISANO
Sculpteur et architecte, né vers 1270, mort en 1348

Il n’y eut jamais d’époque où, la peinture étant en pleine floraison, les sculpteurs ne fussent également excellents, et il suffit, pour s’en rendre compte, d’étudier les œuvres de tous les temps. Ces deux arts, en effet, sont frères, nés le même jour, et sont gouvernés par une seule âme. C’est ce que l’on vit dans Andrea Pisano [1], sculpteur qui vécut au temps de Giotto. Par suite de ses études et de ses travaux, il porta son art à un point de perfection qui le fit estimer le maître par excellence de la Toscane, particulièrement dans le travail du bronze. Tous ceux qui connurent, apprécièrent et recherchèrent ses œuvres, entre autres les Florentins, pour lesquels il quitta sans regret sa patrie, ses parents et ses amis ainsi que tout ce qu’il possédait. Il surmonta toutes les difficultés que ses devanciers n’avaient pu vaincre, et, de fait, leurs œuvres étaient si informes et si grossières que, en comparaison, les siennes parurent réellement miraculeuses. La fortune, du reste, le favorisa en lui mettant sous les yeux les marbres antiques rapportés par les flottes pisanes, et qui sont actuellement, soit au Dôme, soit dans le Campo Santo de leur cité, tandis que Giotto n’eut pas le même bonheur, les peintures antiques ne s’étant pas conservées comme les sculptures.

Andrea, donc, ayant étudié la nouvelle manière de dessiner inaugurée par Giotto, ainsi que le peu de marbres antiques qu’il connaissait, adopta un style meilleur et commença à donner à ses œuvres une beauté dont personne n’avait fait preuve dans cet art jusqu’à son époque. Aussi la bonté de son esprit et son habileté professionnelle ayant été reconnues, fut-il fréquemment employé dans sa patrie. Il fit, en particulier, étant encore tout jeune, quelques petites figures de marbre, pour Santa Maria à Ponte [2], qui lui attirèrent tant de réputation, qu’il fut invité avec de grandes instances, par les Florentins, à venir travailler à l’œuvre de Santa Maria del Fiore. La grande façade antérieure [3] était commencée, et l’on manquait de maîtres pour sculpter

  1. Né à Pontedera, fils de Ser Ugolino, notaire. Il fut apprenti, puis compagnon de Giovanni Pisano.
  2. Appelée communément Santa Maria della Spina.
  3. Achevée aux deux tiers, elle fut détruite vers 1586 et toutes les statues dispersées. Celle de Boniface VIII a été replacée à l’intérieur du Dôme, près de la façade, à droite en entrant. Les autres statues sont sur la route du Poggio Imperiale ; elles n’étaient pas de la main d’Andrea, pas plus que celles de la Misericordia,