Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/40

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qui est vraiment fort beau dans son entourage simulant des rochers. On fait encore avec cette pierre, en la sciant, des tables, des plaques rondes, ovales, et d’autres choses semblables, qui, jointes à d’autres pierres, soit dans des pavements, soit sur des surfaces planes, forment un assemblage très beau, et une charmante composition. On peut polir aussi bien que le porphyre et le serpentin, et on la scie de même. On en trouve à Rome quantité de morceaux enfouis sous les ruines que l’on déblaye chaque jour. Ainsi, avec ces fragments antiques, on fait des ouvrages modernes tels que des portes et d’autres motifs d’ornement, qui font grand effet une fois mis en place.

Voici une autre pierre appelée le mischio, composée de diverses pierres congelées ensemble, et que le temps ainsi que la crudité de l’eau ont intimement liées. On en trouve de grandes quantités en divers endroits, comme dans les montagnes de Vérone, dans celles de Carrare, de Prato en Toscane et de l’Impruneta dans la banlieue de Florence. Les plus beaux et les meilleurs ont été trouvés, il n’y a pas longtemps, à San Giusto à Monterantoli[1] à cinq milles de Florence. Le duc Cosme m’en a fait décorer toutes les nouvelles chambres du palais de portes et de cheminées qui ont été très bien réussies. Pour le jardin Pitti, on a extrait du même endroit des colonnes de sept brasses très belles, et j’ai été étonné d’y trouver tant de solidité. Parce que cette pierre tient de la pierre à chaux, elle peut recevoir un très beau poli, et elle a la couleur du violet tirant sur le rouge, veiné de blanc et de jaune. Mais les plus fins se trouvent en Grèce et en Égypte ; ils y sont également plus durs que les nôtres d’Italie ; il y en a de tant de sortes de couleurs que la nature s’est plu à en former. On en voit à Rome des œuvres antiques et modernes, telles que des colonnes, des vases, des fontaines, des ornements de portes, des incrustations pour des édifices et des carreaux de pavement. Les couleurs en sont extrêmement variées, tirant sur le jaune on sur le rouge, sur le blanc ou sur le noir, sur le gris ou sur le blanc, tachetés de rouge et veinés de diverses couleurs. Les orientaux ont certains tons rouges, verts, noirs et blancs, et le duc en a un vase très ancien, large de quatre brasses et demie, dans son jardin Pitti ; c’est une œuvre très rare, pour être d’un mischio oriental, très beau et très difficile à travailler. Toutes ces pierres sont plus dures, plus belles de couleur et plus fines, comme en font foi aujourd’hui deux colonnes, hautes de douze brasses, qui sont à l’entrée de Saint-Pierre, à Rome, et soutiennent la première

  1. Aujourd’hui Monte Martiri, dans le val d’Ema.