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employés pour tailler le porphyre, et les gradines doivent être munies de dents coupantes d’un côté. D’un fragment de cette pierre, qui s’était détaché de la montagne, le duc Cosme a fait faire une vasque large de douze brasses dans tous les sens, et une table de mêmes dimensions, qui ont été placées dans le palais et le jardin Pitti.

On extrait également d’Égypte et de diverses contrées de la Grèce une certaine pierre noire, dite pierre de touche, qu’on appelle ainsi, parce que, lorsque l’on veut éprouver de l’or, on le gratte sur cette pierre et l’on reconnaît la couleur ; c’est de là que vient son nom. Il y a une variété de cette pierre, différente de grain et de couleur, dont le noir n’est pas aussi franc, et qui n’est pas très belle. Les anciens en ont tiré des sphinx et d’autres animaux, comme on en voit quelques-uns à Rome. La pierre de touche est dure à tailler, mais extraordinairement belle, et susceptible de recevoir un brillant merveilleux. On en trouve en Toscane, dans les montagnes de Prato, à dix milles de Florence, et également dans les montagnes de Carrare. Elle a servi à faire quantité de sarcophages et de tombeaux modernes, par exemple, au Carmine de Florence, dans le chœur, où l’on voit le tombeau de Piero Soderini (qui ne renferme d’ailleurs pas son corps), et le baldaquin, tous deux en pierre de touche de Prato ; ce dernier est si bien travaillé et si brillant qu’il paraît être en satin de soie plutôt qu’en pierre [1]. L’incrustation extérieure de Santa Maria del Fiore, à Florence, est d’une autre sorte de marbres, noir et rouge, qui se travaille de la même manière.

On extrait, en Grèce et, dans tout l’Orient, différentes espèces de marbres qui sont blancs, tirent sur le jaune et sont très transparents. Les anciens les employaient beaucoup pour des bains, des étuves et d’autres lieux où le vent pouvait être incommode pour les habitants. On voit encore aujourd’hui quelques fenêtres qui en sont garnies, dans la tribune de San Miniato à Monte, couvent des moines de Monte Oliveto, devant la porte de Florence : la clarté les traverse et non le vent[2]. Autrefois, avec cette disposition ingénieuse, on remédiait au froid et on éclairait les habitations. On extrayait des mêmes carrières d’autres marbres non veinés, mais de la même couleur, dont on tirait les plus belles statues. Ces marbres étaient très fins de fibre et de grain, et ils servaient encore à tous ceux qui taillaient des chapiteaux, des ornements et d’autres objets en marbre destinés à

  1. En place. Voir la Vie de Benedetto da Rovezzano.
  2. En place.