Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/462

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certain talent. Tommaso fut le premier qui trouva et fabriqua cet ornement de tête des jeunes filles florentines, qu’on appelle une guirlande, d’où lui resta le nom de Ghirlandajo, non seulement parce qu’il en fut l’inventeur, mais parce qu’il en fabriqua une infinité, toutes fort belles, au point qu’on ne trouvait bien que celles qui sortaient de sa boutique.

Placé donc au métier d’orfèvre, mais ne s’y plaisant pas, Domenico ne cessait de dessiner. Comme il était doué par la nature d’un esprit parfait et d’un goût admirable, avec beaucoup de jugement dans la peinture, tout en s’occupant d’orfèvrerie, il acquit très rapidement une telle facilité dans le dessin qu’il reproduisait, dit-on, les personnes qui passaient devant la boutique et qu’il attrapait du premier coup leur ressemblance, comme on peut s’en rendre compte par ses œuvres où l’on voit quantité de portraits d’une ressemblance extraordinaire.

Il fit ses premières peintures dans l’église d’Ognissanti, où il représenta dans la chapelle Vespucci[1] un Christ mort, avec plusieurs saints, et, au-dessus d’un arc, une Vierge de Miséricorde ; dans cette peinture il y a le portrait d’Amerigo Vespucci[2], qui fit la navigation des Indes. Dans le réfectoire du même couvent, il fit une Cène à fresque[3], et à Santa Croce, en entrant dans l’église, à main droite, l’histoire de saint Paulin[4]. Ayant acquis par là une grande renommée, il peignit, pour Francesco Sassetti, dans une chapelle de Santa Trinità, des sujets tirés de la vie de saint François[5] ; cette œuvre, merveilleusement composée, est exécutée avec un soin et une grâce extrêmes. Il y reproduisit le Ponte a Santa Trinità et le palais degli Spini. Sur la première paroi, on voit saint François apparaissant dans les airs et ressuscitant un enfant ; les femmes qui le voient renaître manifestent leur joie et leur étonnement, après s’être affligées de le conduire au tombeau. Les religieux, qui sortent de l’église avec les fossoyeurs et suivent la croix, sont reproduits très naturellement, ainsi que d’autres personnages parmi lesquels on reconnaît plusieurs citoyens illustres de la cité. Dans un autre compartiment, Domenico montra saint François refusant l’héritage de son père, Pietro Bernardone, en présence de l’évêque, prenant l’habit de bure et se ceignant de la corde. Sur la paroi du milieu, on voit saint François allant trouver, à Rome,

  1. Les fresques de la chapelle Vespucci existent encore.
  2. Ainsi que ceux de sa famille.
  3. Existe encore, datée MCCCCLXXX.
  4. N’existe plus.
  5. Ces fresques existent encore.