Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/215

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œuvre, lui seul aurait eu la réputation d’avoir dépassé tous ceux que nous avons célébrés comme des génies rares et divins[1]. Comme, au contraire, il continua à vivre et à produire, il descendit de la hauteur où son début avait donné à espérer qu’il s’élèverait. Quoi qu’il en soit, un ou deux ouvrages parfaits suffisent pour racheter le blâme que les autres lui auraient mérité. Il mourut à Venise, à l’âge de 48 ans.

Lorenzo Lotto[2] peintre vénitien, fut le compagnon et l’ami du Palma. Il imita pendant un temps la manière des Bellni et prit ensuite celle du Giorgione, comme l’attestent une foule de tableaux et de portraits que l’on voit à Venise, chez divers gentilshommes. Dans la maison d’Andrea Odoni se trouve un fort beau portrait de ce seigneur[3], de la main de Lorenzo ; Tommaso da Empoli, Florentin, possède de lui une Nativité du Christ[4], figurée pendant la nuit. Elle est très belle, parce qu’elle est éclairée par la lumière qui s’échappe de la personne du Christ : on y voit encore la Madone agenouillée et un personnage entier qui adore le Christ, et dont la figure reproduit les traits de Messer Marco Loredano.

Pour les Carmes, il représenta sur un tableau un saint Nicolas revêtu d’habits pontificaux et planant dans les airs avec trois anges ; à ses pieds se tiennent sainte Lucie et saint Jean[5]. Le bas de ce tableau est occupé par un très beau paysage parsemé de petites figures et d’animaux. Sur l’un des côtés, saint Georges à cheval tue le dragon ; un peu plus loin, on aperçoit la jeune fille délivrée, et, dans le fond, une ville et un bras de mer. A San Giovanni e Paolo, dans la chapelle de saint Antonin, archevêque de Florence, il représenta ce saint assis entre deux prêtres, avec une multitude de gens dans le bas du tableau[6].

Étant encore jeune et imitant en partie la manière des Bellini et en partie celle de Giorgione, il fit, à San Domenico de Recanati, le tableau du maître-autel, divisé en six compartiments[7]. Dans celui du milieu, on voit la Vierge tenant l’Enfant Jésus et faisant remettre par un ange l’habit de son ordre à saint Dominique, agenouillé devant elle ; il y a encore deux petits enfants, dont l’un joue du luth et l’autre du rebec,

  1. Son testament est du 28 juillet 1528. 11 meurt au commencement du mois d’août de la même année.
  2. Né à Trévise. Il signait Laurentius Lotus Venetus.
  3. Tableau perdu.
  4. Ibid.
  5. En place, dans l’église Santa Maria del Carmine ; signé, daté 1529.
  6. Ce tableau est en place
  7. Id. Peint à Venise et envoyé à Recanati, peu après 1525.