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Page:Les voyages advantureux de Fernand Mendez Pinto.djvu/250

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Voyages Aduentureux

uiron midy, nous fuſmes attaquez par vn Corſaire nõmé Premata Gundel, ennemy iuré de la nation Portugaiſe, à laquelle il auoit ſouuent fait de grands dommages, tant à Patane, qu’à Sunda, à Siam, & en pluſieurs autres lieux, quand il y trouuoit les gens à ſon aduantage. Ce voleur croyant que nous fuſſions des Chinois s’en vint nous aſſaillir auec deux Iuncos fort grands, dans leſquels il y auoit deux cens hommes de combat, outre les gens de Marine. Alors l’vn d’eux s’eſtant accroché au Iunco de Mem Taborda, peu s’en fallut qu’il ne s’en rendiſt maiſtre ; dequoy s’eſtant apperceu Quiay Panjan, qui pour lors eſtoit vn peu plus auant dans la mer, il rendit le bord ſur luy & l’inueſtit à pleines voiles, & le prenant du coſté de ſtribord luy donna vn ſi grand chocq qu’ils allerent tous deux à fonds, & par ce moyen Mem Taborda fut deliuré du danger où il eſtoit. En meſme temps il fut ſecouru en diligence par trois de nos Lorches, qu’Antonio de Faria auoit priſes au port de Nouday, & il plût à Dieu que par leur heureuſe arriuée l’on ſauua la pluſpart de tous nos gens, & que tous ceux qui eſtoient du coſté de l’ennemy furent noyez. Cependant voila que le Corſaire Premata Gundel, s’en vint attaquer le grand Iunco, dans lequel eſtoit Antonio de Faria. La premiere choſe qu’il fiſt, fût de l’accrocher de pouppe & de prouë auec deux crampons, attachez à de longues chaiſnes. Alors il ſe commença entr’eux vn combat qui meritoit bien d’eſtre veu, où apres qu’il euſt duré plus de demie heure, les ennemis le renouuellerent auec vn ſi grand courage, qu’Antonio de Faria s’y trouua bleſſé auec la pluſpart de ſes gens, & ainſi il courut fortune d’eſtre pris par deux diuerſes fois. Neantmoins le bon heur voulut pour luy, qu’eſtant ſecouru bien à point de trois Lorches & d’vn petit Iunco, dans lequel commandoit Pedro de Sylua, il plût à Dieu qu’auec ſe ſecours les noſtres regagnerẽt ce qu’ils venoient de perdre. Auſſi preſſerent-ils les ennemis de telle ſorte, que le combat ſe termina peu de temps apres auec la mort de huictante-ſix Mahumetans, qui eſtoient deſia dans le Iunco d’Antonio de Faria, & l’y ſeroient de ſi pres, que nos gens n’y auoient dedans que le haut du chapiteau. Apres que les noſtres furent entrez dans le Iunco du Corſaire, ils y firent