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de Fernand Mendez Pinto.

nous auions veu & ouys ; tant en l’autre Baye qu’en celle où nous eſtions, s’y venoient rendre pour y repaiſtre à cauſe des immondices & des charongnes que les debordemens de ces riuieres y apportoient, dont ces monſtres eſtoient amorcés, ce qui n’arriuoit qu’en ce ſeul endroit que nous auions laiſſé. Antonio de Faria luy ayant demandé là deſſus d’où pouuoiẽt venir ces riuieres, il reſpondit qu’il n’en ſçauoit rien, mais qu’il eſtoit bien veritable que les Annales de la Chine faiſoiẽt foy, que deux d’icelle prenoiẽt leur ſource d’vn grand lac qui s’appelloit Moſcombia, & les deux autres d’vne prouince nõmée Alimania, où il y a des hautes montagnes qui tout le long de l’année ſont couuertes de neiges, tellement que ces neiges venant à ſe fondre, ces riuieres s’enfloient comme nous voyons, car alors elles eſtoient plus grosses qu’en tout autre temps de l’année. A cela il adiouſta, qu’entrant dans l’emboucheure deuant laquelle nous eſtions ancrez, qui s’appelle Paatebenam, nous deuions continuer noſtre route, dreſſant la prouë à l’Eſt & à l’Eſt-oüeſt, pour chercher derechef le port de Nanquin, que nous auions laiſſé derriere nous à deux cent ſoixante lieuës, à cauſe qu’en toute cette diſtance nous auiõs multiplié en vne hauteur bien plus grande que n’eſtoit celle de l’Iſle, que nous allions chercher. Or cõbien que cela nous trauaillaſt grandement, ſi eſt-ce que Similau prioit Antonio de Faria de tenir ce temps-là pour bien employé, à cauſe qu’il auoit fait pour le mieux, & pour vne plus grande aſſeurance de nos vies ; là deſſus enquis par Antonio de Faria combien il falloit de temps pour paſſer la riuiere où il le menoit, il luy reſpondit qu’il en ſeroit dehors dans 14. ou 15. iours, & que cinq iours apres il luy promettoit de le mettre luy & ſes ſoldats en l’Iſle de Calempluy, où il eſperoit de contenter amplement ſon deſir, & de luy faire trouuer pour bien employez les trauaux dont il ſe plaignoit maintenant. Antonio de Faria l’ayant embraſſé là deſſus fort eſtroitemẽt, luy promit d’eſtre à iamais ſon amy, & le reconcilia auec ces ſoldats, deſquels il ſe plaignoit fort auparauant, & de qui neantmoins il demeura fort ſatisfait à la fin. Ainſi r’aſſeuré par les paroles que Similau venoit de luy dire, & certifié de la nouuelle route par