Page:Les voyages au théâtre par A. D'Ennery et Jules Verne.djvu/339

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LE MAÎTRE DE POLICE.

Silence ! Écoutez tous ! (Lisant.) « Par arrêté du gouverneur de Moscou, défense à tout sujet russe, et sous quelque prétexte que ce soit, de passer la frontière. »

(Cris de désappointement dans la foule.)

NADIA.

Mon Dieu !… que dit-il ?

JOLLIVET, à Blount.

Cela ne nous regarde pas !…

BLOUNT.

Je passai toujours, moi.

NADIA, au maître de police.

Monsieur… monsieur… mon passeport est en règle,… je puis passer, n’est-il pas vrai ?

LE MAÎTRE DE POLICE.

Vous êtes Russe ?… C’est impossible.

NADIA.

Monsieur… je vais rejoindre mon père à Irkoutsk !… Il m’attend !… Chaque jour de retard, c’est un jour de douleur pour lui !… Il me sait partie !… Il peut me croire perdue dans ce pays soulevé, au milieu de l’invasion tartare !… Laissez-moi passer, je vous en conjure !… Que peut faire au gouverneur qu’une pauvre fille comme moi se jette dans la steppe !… Si j’étais partie il y a une heure, personne ne m’eût arrêtée !… Par pitié, monsieur, par pitié !

LE MAÎTRE DE POLICE.

Prières inutiles ! L’ordre est formel ! (Aux Cosaques.) Placez-vous à l’entrée de la route, et, à moins d’un permis spécial, que personne ne passe.

NADIA, se traînant à ses pieds.

Monsieur !… monsieur !… Je vous en conjure, à mains jointes et à genoux ! Ayez pitié !.. ! Ne nous condamnez pas, mon père et moi, à mourir désespérés et si loin l’un de l’autre !…

BLOUNT.

Oh ! j’étais très émou…

(À ce moment, Strogoff sort de la maison de police.)