Page:Les voyages au théâtre par A. D'Ennery et Jules Verne.djvu/367

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

JOLLIVET.

Nous sommes journalistes, monsieur… deux reporters.

IVAN, avec mépris.

Ah ! oui, je sais, des reporters… c’est-à-dire une sorte d’espions !…

BLOUNT, furieux.

Espionne ! nous, espionne !

JOLLIVET, avec force.

Monsieur, ce que vous dites est infâme, et j’en prends à témoin l’Europe tout entière !

IVAN.

Que m’importe l’opinion de l’Europe ! Je vous traite comme il me plaît, parce qu’on vous a pris parmi les Russes, qui sont mes ennemis, vous le savez bien !

JOLLIVET.

J’ignorais que la patrie devînt jamais l’ennemie d’un loyal soldat !

BLOUNT.

C’était le soldat déloyal qui devenait le ennemi de son pétrie !

JOLLIVET.

Et celui-là est un traître !

IVAN, avec colère.

Prenez garde et souvenez-vous que je suis tout-puissant ici !

JOLLIVET.

Vous devriez tâcher de le faire oublier.

IVAN, avec colère.

Monsieur… (Se calmant.) L’insulte d’un homme de votre sorte ne peut arriver jusqu’à moi !

JOLLIVET.

C’est naturel, colonel Ogareff, la voix ne descend pas, elle monte !

IVAN, se levant et menaçant Jollivet de son poignard.

C’en est trop !

BLOUNT, à part.

Il n’était pas satisfaite du tout !

IVAN, après avoir remis son poignard à sa ceinture.

Vous me payerez ce nouvel outrage et vous le payerez cher ! (Appelant.) Gardes ! (Un Tartare entre.) Que l’Anglais soit conduit hors du camp, avant une heure… et qu’avant une heure, l’autre soit fusillé ! (Il sort avec le Tartare.)